Roadtrip moto en Californie

 

Récit d’un motard à la découverte de la Californie, aux alentours de Los Angeles :
l’occasion de profiter à moto de paysages variés. Par Thierry Traccan. 

 

 

 

Partie 3 : Les bords de mer californiens à moto

En Californie, le Pacifique bien plus râleur entraîne ses vagues à sculpter le rivage, creusant de fortes pentes, une marée finalement pas très visible, et un sable rendu très fin. Après Laguna, notre halte suivante se fait à Newport Beach, une station cossue, façonnée de constructions en bois colorés qui encerclent un joli et vaste port de plaisance, où sont amarrées de superbes embarcations. Sur des poteaux plantés dans la marina, des pélicans réchauffent leurs plumes. L’endroit est calme. En cette mi-janvier, et en semaine, beaucoup des résidents sont absents. Parfait pour apprécier l’instant, même s’il est vrai que le soleil, lui, se partage de toute façon.

On aurait bien aimé grimper sur une de ces luxueuses embarcations désertes, histoire de voir comment ça fait depuis l’eau, mais on n’a pas osé. Et puis, pas sûr que ça ait amusé une police jamais bien loin, soit postée, soit patrouillant… En même temps, il y a une particularité assez singulière mais appréciable sur les routes, c’est que le panneau de vitesse maxi tient à l’usage plus de l’indication que de l’obligation. Une base avec laquelle il est possible, sans grand risque, de prendre quelques libertés.

En fait, pour rouler sans craindre de se faire amender, il suffit de se caler dans le flot. Un flot qui, sauf circulation trop dense, évolue systématiquement plus vite que ce qu’indiquent les panneaux. Et souvent de plus de 10 voir 20 miles par heure, soit un dépassement de plus de 30 km/h.

Une tolérance davantage permissive pour les motos qui ne sont que rarement embêtées, à moins de faire n’importe quoi. Car c’est le n’importe quoi qui attire l’attention des forces de l’ordre, slalomer par exemple, couper des lignes en faisant fi des autres conducteurs, ou un différentiel de vitesse trop important. Une tête qui dépasse, on la coupe, mais si toutes les têtes dépassent, on les regarde passer…

C’est donc sur un rythme disons, à la fois prudent, concentré et soutenu, que l’on met cap au nord. Nouvelle halte à Huntington Beach, capitale du surf aux USA qui accueille chaque année l’étape américaine du championnat du monde de la discipline. Pas de port à Huntington, mais un magnifique « pier », une sorte de grande jetée qui s’avance dans le Pacifique. Dans le centre-ville strié de restaurants et de boutiques de surf, les gens se baladent en tongs et en shorts en cette après-midi d’hiver. Nous, c’est les pieds dans nos pompes de moto et dans notre jean que l’on poursuit la découverte.

Entre Huntington et Long Beach, la petite bourgade de seal beach (la plage des phoques), et avant de l’atteindre, une sorte de « no mans land » où les habitations laissent la place à de grands champs d’extraction pétrolière. Au 20ème siècle, les puits y étaient plus nombreux que les palmiers, depuis, beaucoup des tours ont été démontées, et l’espace industriel s’est garni de maisons d’habitation. L’urbanisation débridée accompagnant la ruée de la population vers ce coin de terre où le soleil brille 320 jours par an…

La Californie, un état fantasmé par beaucoup, et façonné par une population qui en a fait une terre d’accueil bigarrée, peuplée de 140 nationalités où plus de 224 langues sont parlées. Un état roi, et très riche puisque représentant (chiffres de 2018) 14,5% du produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis.

Pour mieux comprendre, si la Californie était un pays, forte d’un PIB de 3 000 milliards de dollars par an, elle serait la 5ème puissance économique mondiale, devant la Grande Bretagne, la France, et l’Inde, seulement devancée par les USA, la Chine, le Japon et l’Allemagne ! Quant à la cité de Los Angeles, elle représente la troisième ville au monde par son PIB après New York et Tokyo.

La cité des anges, c’est aussi le cinéma (Hollywood), le sport avec des équipes majeures en basket-ball comme les Lakers ou les Clippers, les jeux olympiques qui s’y sont déroulés en 1984 et qui y reviendront en 2028 (après Paris)… C’est surtout en ce qui nous concerne au plus près « the place to be » pour les meilleurs pilotes de supercross du monde qui trouvent dans les environs de L.A. des conditions optimales pour s’entrainer. Et plus au nord, c’est sur les hauteurs de Laguna Seca que les fans de vitesse se retrouvent. Partout encore l’occasion de profiter à moto de paysages variés, et revenons-y, de bords de mer.

Des bords de mer que notre Tiger frôlera, espérant même les traverser quand elle retrouva, sur un quai du port de Long Beach, le paquebot transatlantique Queen Mary, fleuron naval de l’Angleterre des années 30, des années 1930… Long Beach dont on part pour des croisières d’une journée, à la rencontre des grands cétacés qui croisent souvent non loin des côtes.

On pourrait vous raconter aussi Redondo Beach et son Pier certes moins grand que celui d’Huntington, mais qui a conservé ses magasins, restaurants, et son architecture en bois. On pourrait aussi vous parler du port de Los Angeles, le troisième du monde en ce qui concerne le trafic de containers ! Notre Tiger s’amuse d’ailleurs sur le port…

Transformée en libellule, entamant des petits wheeling pour passer au-dessus des rails de chemin de fer qui zèbrent la zone portuaire, passant en mode tapis volant au-dessus des nombreux nids de poules qui sculptent la chaussée. En plus d’être confortable sur les chocs, la vivacité du 3-clindres permet à notre anglaise de se jouer des conditions rencontrées. Et quand on quitte le port, direction le nord via la freeway sur laquelle on se cale à 75 miles, soit 120 km/h, la bulle, ni trop haute ni trop basse offre une bonne protection.

C’est sur la plage de Venice beach que l’on achève notre périple. Impossible de s’approcher du sable, c’est dans une artère adjacente à la promenade que nous garons notre Tiger, et le casque à la main que l’on se balade au milieu des skates, rollers, trottinettes… Piétons. Dans l’air, plus que les embruns du Pacifique, c’est l’odeur prenante du cannabis qui flotte. La Californie autorise sa consommation, et du côté de Venice, pas mal d’échoppes en font le commerce. Autrefois, ce quartier avait plutôt mauvaise réputation. Aujourd’hui, sous des allures toujours un peu « bad boy », le quartier est devenu très touristique, et très surveillé.

Une unité de police est implantée à l’année au cœur du quartier. De jour, la fréquentation est plutôt bon enfant, on vient lézarder sur la plage ou sur les pelouses, profitant du spectacle offert par des basketteurs et des skateurs de talent, le tout baigné par le climat méditerranéen et ses vents du pacifique qui refroidissent le bord de mer l’été, et le réchauffent l’hiver. Encore prendre quelques degrés, se réchauffer la peau une dernière fois avant de rendre la clé de l’anglaise, et de regagner l’hexagone et son hiver qui, lui, nous aura fait moins de cadeau.

 

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*Photos : Olivier de Vaulx

 

 

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